« Eglises fondées par les apôtres » – Argument fallacieux des apologètes romains

Chères lectrices, chers lecteurs,

nous nous penchons aujourd’hui sur un argument fréquemment employé par des théologiens catholiques romains, à savoir celui de conclure une phrase sur quatre par « les églises fondées par les apôtres ». Ces théologiens se servent d’un argument matériel et charnel (un lieu de fondation et une personne) pour sous-entendre qu’ils détiennent la vérité de façon exclusive.

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Ce qu’il est bon de préciser en préambule

Ça va sans dire, mais ça va mieux en le disant, le présent article n’est pas une attaque en règle contre les personnes de confession catholique. Ces quelques lignes sont une réponse à un argument déployé fréquemment au cours de dialogues œcuméniques par des théologiens. Je me permets de formuler une réponse, pour la simple et bonne raison qu’à travers le fait de ponctuer de nombreuses phrases par « nous, les églises fondées par les apôtres », se manifeste un wagon de condescendance à peine voilée vis à vis des réformés.

Il y a bien une autorité apostolique

Il a une autorité apostolique, tout le monde est d’accord là-dessus. Encore faut-il s’entendre sur les limites de cette autorité. Nos amis romains la placent à un niveau matériel, précisant sans cesse qu’ils sont les « églises fondées par les apôtres ».

Paul a eu l’occasion de défendre son autorité et d’en rappeler le fondement:

1 Co 15.1-9

1 Je vous rappelle, frères, l’Évangile que je vous ai annoncé, que vous avez reçu, dans lequel vous avez persévéré, 2 et par lequel vous êtes sauvés, si vous le retenez tel que je vous l’ai annoncé; autrement, vous auriez cru en vain.

3 Je vous ai enseigné avant tout, comme je l’avais aussi reçu, que Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures; 4 qu’il a été enseveli, et qu’il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures; 5 et qu’il est apparu à Céphas, puis aux douze. 6 Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart sont encore vivants, et dont quelques-uns sont morts. 7 Ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. 8 Après eux tous, il m’est aussi apparu à moi, comme à l’avorton; 9 car je suis le moindre des apôtres, je ne suis pas digne d’être appelé apôtre, parce que j’ai persécuté l’Eglise de Dieu. 

L’enseignement de la vérité et ce mandat venu de Dieu sont donc le sceau de l’apostolat de Paul. L’autorité apostolique est manifeste dans les écritures, chaque livre du Nouveau Testament ayant une autorité directement ou indirectement issue d’un des douze. Il y a donc bien une autorité apostolique, autorité dans la transmission de la parole de Dieu qui nous est parvenue avec les Écritures.

Prétendre que la succession apostolique concerne des lieux et des églises en dur est un non sens. En effet, Paul a fondé des églises. Or, il dresse à Timothée le portrait robot d’un bon responsable, en disant que celui-ci doit être un « mari fidèle à sa femme » (1 Tm 3.2). Si il est si important pour les romains de se désigner comme église fondée par un apôtre, pourquoi ne suivent-ils pas l’exemple donné par Paul, qui a fondé des églises et écrit qu’un responsable devait être un bon mari?

L’argument romain a déjà été employé par le passé…

L’argument de se vanter d’appartenir aux « églises fondées par les apôtres » ne date pas d’hier dans la forme. Certes du temps de l’ancienne alliance il n’y avait pas encore d’apôtres, cependant Jean Calvin relève des similitudes dans la prose:

Jean Calvin, Institution de la Religion Chrétienne, Livre IV – chapitre II

Il apparaît que les défenseurs de l’église romaine n’avancent pas autre chose aujourd’hui que ce que prétendaient les Juifs, quand les prophètes de Dieu les accusaient d’aveuglement, d’impiété et d’idolâtrie. Ils se prévalaient du Temple, des cérémonies et de la qualité de prêtre, éléments qu’ils estimaient constituer l’Eglise. (…) C’est pourquoi je ne dois pas présenter d’autre argument d’autre argument pour m’opposer à eux que celui qu’utilisait Jérémie pour détruire l’assurance des Juifs, lorsqu’il leur disait de ne pas se glorifier en répétant ‘c’est le Temple du Seigneur! C’est le Temple du Seigneur! C’est le Temple du Seigneur!’ (Jr 7.4).

La succession apostolique ne saurait donc se résumer à un lieu précis de fondation de communauté. En effet, si nous poussions à l’extrême le principe de « hors des églises fondées par les apôtres en dur point de salut », ça voudrait dire que le Seigneur a oublié la Saxe, la Hollande, les USA, la Corée dans son plan de salut? Il n’aurait pensé qu’aux anciens états latins? Quelle vision charnelle des choses! Vision charnelle et se heurtant aux propos de Paul, qui mieux que personne résume les choses, « Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus-Christ » (Ga 3.28). La véritable unité est là, en Christ! Ce qui scandalisait les Juifs au premier siècle, est ce qui semble inconcevable aux apologètes catholiques aujourd’hui: la perte du copyright.

Certains Pères de l’Eglise n’étaient pas étrangers à cette vision, Cyprien de Carthage (IIe siècle) dira que « il n’y a qu’une seule Eglise qui est présente comme il y a plusieurs rayons de soleil mais une source unique de clarté, ou comme un arbre, il y a beaucoup de branches mais un seul tronc porté par ses racines. (…) Ainsi l’Eglise illuminée par la clarté de Dieu est disséminée dans le monde entier. » (Cyprien de Carthage, L’Unité de l’Eglise).

Et alors?

Insister sur l’autorité apostolique est bien, Paul lui-même dans ses lettres insiste sur le rôle et la mission de l’apôtre. Cependant l’argument de se prévaloir « Eglise fondée par les apôtres », un peu comme un Label de consommation, est inexact et fait montre d’un goût prononcé pour la temporalité et le matériel. On peut justement se prévaloir d’une doctrine découlant de l’enseignement des apôtres, nous y sommes plus qu’invités à travers les épîtres, en revanche opposer les « églises fondées par les apôtres » et les autres (sous entendu les églises issues de la réforme) n’a aucun sens comme nous venons de le voir.

Ça n’a aucun sens, mais ça rassure le consommateur. C’est bien le rôle d’un label non?

2 réflexions au sujet de « « Eglises fondées par les apôtres » – Argument fallacieux des apologètes romains »

  1. ppcatho

    Et puis il y a les Eglises fondées par Luther au XVI° s avec toutes, en commun, une séries de traditions non apostolique et non biblique : Le salut par la seule foi, l’absence de communion avec les saints du Ciel, Le salut par la foi seule, l’absence de purification après la mort.

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